Interview de Richard Guérineau (Sceneario.com - 2005)
Richard Guérineau Angoulême 2005
Sceneario.com : Commençons par l'incontournable une petite présentation :o)
Richard Guérineau : J'ai commencé à
faire de la bande dessinée en 93/94.
J'ai réalisé
une première série qui s'appelait L'as de pique chez
Dargaud. Elle a été rééditée depuis chez Delcourt en
version intégrale noir et blanc.
Ensuite j'ai
travaillé sur Le chant des Stryges.
En parallèle je
fais un peu d'illustration et quelques bricoles à droite
à gauche. Je viens de terminer quelques couvertures de
romans pour les éditions J'ai lu. J'ai relooké les
romans de Lovecraft, des choses diverses comme ça.
Sceneario.com : Uniquement chez J'ai lu ?
Richard Guérineau :
Essentiellement. Ils étaient venus me trouver il y a
quelques années parce que j'avais fait un porte folio
avec la librairie Ciné flash sur des thèmes gothiques
fantastiques, époque 19e et ça leur avait bien plu.
Les premières illus que j'ai faites avec eux c'était
des trucs en noir et blanc, très graphiques. Depuis je
me suis mis à l'ordinateur et du coup je fais de la
peinture sur Photoshop, même principe que sur les
couvertures des Stryges, avec un traitement plus
photographique.
Sceneario.com : Tu nous parles de ton actualité ?
Richard Guérineau : Je viens de terminer le tome 9 des Stryges. Parallèlement, j'ai envie de développer d'autres projets très différents, seul ou avec un collaborateur, sur lesquels j'ai commencé à travailler mais qui se réaliseront sur du long terme. Je ne veux pas me précipiter, je préfère prendre mon temps pour être sûr que ce ne sont pas des coups de cœur éphémères.
Sceneario.com : Comment va s'orienter l'histoire ?
Richard Guérineau : L'enquête sur Sandor G. Weltman va nous amener à explorer les méandres du passé afin de comprendre la nature complexe de ses relations avec les stryges. Quant à nos protagonistes, c'est l'ombre qui prend le devant de la scène et qui va s'avérer être un personnage plus humain mais également de plus en plus ambigu. Elle s'achemine progressivement vers un destin paradoxal qui sera au final un dilemme cruel et difficile à accepter.
Sceneario.com : Il te faut un an en moyenne pour faire un album ?
Richard Guérineau : Il me faut sept huit mois pour faire un Stryge sachant que c'est toujours entrecoupé de divers autres travaux. Donc je l'étale grosso modo sur une dizaine de mois. Mais si vraiment je n'ai rien d'autre à faire je peux faire un album en sept mois.
Sceneario.com : Quelle efficacité ! (rires)
Richard Guérineau
: C'est très confortable de pouvoir travailler
vite.
Je n'ai jamais supporté de recommencer quinze
fois la même image pour arriver à un truc parfait comme
c'est le cas de certains dessinateurs.
Je progresse
en faisant de la case et surtout je vois le récit
progresser. J'essaie d'avancer le plus possible, de
foncer. L'évolution se voit sur l'ensemble de la série.
Avec un peu de recul on corrige les erreurs, ça
s'améliore.
Il n'y a rien de plus angoissant que de
partir sur une série longue en se disant en plus « je
vais passer trois ans sur chaque album », c'est un
cauchemar ça !
Comme je dis toujours : le meilleur
album que j'ai réalisé, c'est le prochain
(rires).
Sceneario.com : Et quand tu regardes en arrière, il y a vraiment des moments où tu as noté de grosses évolutions ?
Richard Guérineau : Absolument. Il y a
eu des caps dans les Stryges. Il est vrai que maintenant
quand je revois les tous premiers j'ai toujours un peu
de mal.
J'ai passé un petit cap au quatrième tome et
curieusement c'est là que la série a vraiment commencé à
décoller.
Graphiquement j'ai changé ma méthode de
travail sur le 6 et je pense que cela se voit vraiment
au résultat. Enfin peut-être plus sur le noir et blanc,
avec la couleur ça uniformise un peu tout.
Sceneario.com : Il y a eu des changements de coloriste aussi.
Richard Guérineau : Effectivement, avec les changements
de coloristes, on se rend peut-être moins compte de
l'évolution graphique. Mais sur les planches en
noir et blanc, il y a vraiment un changement de
technique qui donne plus d'énergie à l'ensemble.
Depuis ce changement de technique, j'ai
l'impression à chaque album d'avoir de plus en plus de
facilité. J'arrive à un stade où c'est vraiment plaisant
de continuer la série.
En plus, on connaît
parfaitement l'univers, et c'est très excitant lorsque
les personnages nous sont tellement familiers qu'ils en
deviennent des compagnons de
route.
Sceneario.com : Le nombre d'album est fixé ?
Richard Guérineau : Oui, il y aura en tout trois saisons de six albums chacune. Nous en sommes donc à la moitié.
Sceneario.com : Quelle sera la trame ?
Richard Guérineau : Pour la
troisième saison, on a une trame très globale qui se
transformera en fonction de la deuxième saison, mais on
sait parfaitement où on va.
Dès le début on s'est
dit qu'il fallait tout prévoir à l'avance sinon on ne
serait pas retombé sur nos pattes. L'histoire est
tellement complexe, il y a tellement de ramifications
que l'on ne pouvait pas faire autrement.
Sceneario.com : Il y aura des one shots ?
Richard Guérineau : C'est une possibilité. Mais sur Le chant des Stryges, ce sera vraiment trois saisons bien définies avec une fin.
Sceneario.com : Et sur les séries parallèles ?
Richard Guérineau : Sur
les séries parallèles il y aura six albums de chaque.
Pour Le maître du jeu il y en a quatre, il en reste donc
deux à paraître, pour Le clan de chimères c'est pareil.
Plus la nouvelle série avec Les hydres d'Hares qui
avait déjà été annoncée maintes fois. On a un
dessinateur qui travaille sur les planches, mais je n'ai
pas de date précise pour indiquer quand ce sera terminé.
Mais ça y est c'est lancé.
Sceneario.com : Au début c'est Marc Moréno qui était pressenti ?
Richard Guérineau : Ce n'était pas réaliste car il ne pouvait pas tout gérer en même temps. Je crois qu'il avait fait des ruffs. Le dessinateur actuel a essayé de s'accorder un peu avec les ruffs de Marc, il a réussi je pense à trouver sa liberté, sa place dans le projet.
Sceneario.com : Le
Stryges ont changé de format. Je m'étais posé la
question du
pourquoi, ce que vous aviez voulu
apporter, quels changement cela avait en traîné...
Richard Guérineau : Il n'y a pas eu de
changement au niveau des planches. Le changement
concernait uniquement la maquette, la présentation de
l'objet. Au départ on a demandé à l'éditeur de faire
quelque chose pour relancer un peu toute la série sur la
première saison. Cela a mis du temps à se mettre en
place.
On aurait aimé que cela se fasse dès
le tome sept. Et puis sur le tome huit on est revenus à
la charge. Et là Delcourt nous a proposé de changer la
maquette, de relooker un peu toute la série et puis de
changer au passage le format de l'album.
Là
c'est plus pour des raisons éditoriales. Cette
collection petit format, ils n'arrivaient pas à la
promouvoir, cela ne faisait pas partie de « la culture
Delcourt ». Donc ils se sont dit on va revenir à du
grand format, c'est ce que l'on sait faire, c'est ce que
l'on sait vendre. C'est la raison du grand
format.
Evidemment il y a eu quelques raleurs comme toujours qui ont dis « Ah ouais, mais va falloir qu'on rachète tout ». Il n'y a aucune obligation de racheter, il n'y a pas eu de modifications. C'est le problème des collectionneurs.
Nous sommes complètement satisfaits de la nouvelle mouture. Au bout du compte je pense que cela a été très positif.
Sceneario.com : C'est vrai qu'il y a d'autres séries dans le même cas, comme HK qui ont suivi le même processus. Par contre, dans ce dernier cas pas mal de changements ont été apportés dans la conception du fait du changement de format.
Richard Guérineau
: Il ne faut pas se leurrer, ce sont d'abord
des raisons éditoriales et aussi commerciales qui font
que l'on va préférer faire du grand format.
Cela
dit, il y a des choses qui sont adaptées au grand format
et d'autres, non. Quelque chose qui a été conçu pour
être en format comics par exemple. A une époque ont a vu
des comics américains édités en format européen, je ne
trouve pas ça bon car ce n'est pas prévu pour. En
revanche, sur les Stryges avec le nouveau format on
gagne deux centimètres sur chaque planche et je me suis
dit que « putain, le dessin y gagne !».
Le dessin,
la narration, tout est très dense avec beaucoup de
cases. Du coup cela paraît plus lisible, plus fluide, on
y a clairement gagné. Au passage, je n'ai pas changé de
méthode, je travaille toujours au même
format.
Sceneario.com : Le fait de travailler aujourd'hui en atelier ça t'a apporté quoi ?
Richard Guérineau : Avant de
commencer à travailler en atelier il y a eu un moment,
je crois que c'était sur le tome six, où j'ai vraiment
eu un gros coup de blues à travailler tout seul chez
moi. Pourtant je l'ai fait pendant des années et puis à
un moment donné je n'en pouvais plus d'être seul, cela
me pesait.
J'ai eu l'occasion de travailler
en atelier. Ca peut paraître idiot, mais c'est le côté
sortir de chez soit pour aller travailler, être avec
d'autres gens, pouvoir discuter ne serait-ce que même
cinq minutes dans la journée qui fait la différence.
Avant je me disais « je suis chez moi
donc je peux aller voir des copains et tout, mais si je
vais voir des copains je perds ma journée de travail ».
Il y a toujours ce problème là chez le dessinateur et le
fait de travailler en atelier m'a permis de le
résoudre.
Après il y a d'autres soucis en
atelier. Il faut arriver à gérer une vie en collectivité
etc. J'ai changé d'atelier depuis, je suis avec d'autres
gens qui ne font pas de BD, des auteurs jeunesse, des
graphistes, il y a même un architecte. Ce sont des gens
très ouverts qui font chacun des choses différentes.
Cela permet d'échanger, d'avoir des discussions sur des
tas de choses, on ne reste pas bloqué sur la BD et cela
me convient parfaitement.
Sceneario.com : C'était dans Pavillon rouge que l'on voyait des strips sur l'atelier.
Richard Guérineau : Alors là, ne croyez absolument pas ce que racontent les strips de Pavillon rouge, cela n'avait rien à voir avec la réalité de l'atelier (rires).
Sceneario.com : Ha bon, par exemple ?
Richard Guérineau : Ils mettaient en scène tous les
gens qui étaient à l'atelier. Mais ça ne correspondait
pas du tout, mais alors pas du tout à la réalité.
Quand ils montrent Corbeyran qui revient de Bali,
qui repart toujours en voyage ; mais c'est tout le
contraire d'Eric. Eric est super angoissé à chaque fois
qu'il part en voyage. Ce sont des délires, je ne sais
pas d'où ça vient mais ça n'a rien à voir avec la
réalité.
Sceneario.com : Concernant tes méthodes de travail, tu nous disais que tu faisais des crayonnés préparatoires « peu élaborés ».
Richard Guérineau : J'ai du mal
m'exprimer ou être mal compris. Ca dépend de quel point
de vue on se place.
Quand j'ai dit cela je pensais à
ces dessinateurs dont les crayonnés sont très
charbonneux, très poussés, il y a toutes les ombres,
tout est là. Et à l'encrage ils sont obligés de
synthétiser. Pour un trait qui va vibrer au crayon à
papier, il va falloir faire un trait nickel au pinceau.
Mon crayonné est très précis mais
c'est quasiment de la ligne claire. Je fais un premier
crayonné où je pose mes masses avec un crayon tellement
sec que l'on ne le voit presque pas. Puis je reviens
par-dessus avec un crayon gras et là c'est le trait
quasiment final. Du coup tout le reste
disparaît.
Mon crayonné est au format A4,
c'est assez petit et il est très précis, mais c'est de
la ligne claire. Ensuite je l'agrandis. C'est dans ce
sens la que je disais qu'il n'était pas élaboré. Ce
n'est pas qu'il n'est pas élaboré, c'est qu'il n'est pas
chargé, c'est vraiment du trait.
Donc ensuite
j'agrandis ça à la photocopie au format A3, je fais un
encrage à la table lumineuse, je reprends tout sur un
autre papier au feutre et au pinceau. Cela me permet
justement de me lâcher et puis d'avoir là un trait
intéressant. Là je pose le noir, je pose les masses et
j'y vais. Mais je pars d'un crayonné qui est très
propre.
Et j'essaie surtout de ne pas tout
poser dans le crayonné pour garder une liberté à
l'encrage. Avec les petites corrections que cela peut
exiger quand l'effet n'est pas satisfaisant. Un coup de
blanco et puis voilà. C'est cette méthode de travail qui
me permet d'avoir une plus grande liberté dans l'encrage
et de davantage m'amuser à cette étape.
Sceneario.com : Cela donne plus de fluidité ?
Richard Guérineau : C'est
curieux parce que le crayonné et l'encrage c'est la même
chose avec deux traitements différents. Je ne sais pas
très bien comment expliquer ça sans le visualiser, mais
au fond ce sont deux traitements bien différents.
C'est vrai que je pourrais quasiment photocopier mon
crayonné en poussant un peu les noirs pour avoir un
trait noir et revenir directement au pinceau dessus.
Maintenant je me dis que ce n'est peut-être pas sur les
Stryges qu'il faut que je change encore de méthode. Pour
l'instant je vais conserver cette
technique.
Sceneario.com : D'où l'intérêt de faire une publication noir et blanc.
Richard Guérineau : Pour
le tome huit, il y a eu un tirage de tête en noir et
blanc. Depuis cette réédition les gens me parlent
davantage de mon dessin en noir et blanc. Avant, ils ne
l'avaient pas remarqué. Il y a plein de gens qui m'ont
dit « en noir et blanc je redécouvre ton
dessin».
Paradoxalement la couleur amène bien
évidemment de l'ambiance, tout un tas de choses. Mais en
même temps c'est vachement difficile de la gérer,
peut-être encore plus sur mon dessin, ça a tendance à
l'aplatir, à noyer un peu les contrastes.
Sur le
tome 9, le coloriste change de nouveau. C'était une
volonté de ma part et j'avoue que je suis totalement
satisfait de la collaboration avec Christian
Favrelle.
Sceneario.com : Justement, pourquoi tu ne fais pas toi-même la couleur ?
Richard Guérineau :
Au départ sur L'as de pique, ma première série, je
faisais la couleur. Et puis sur les Stryges j'avais
envie d'en rester au noir et blanc. J'avais vraiment
envie de m'amuser ainsi, de gagner du temps aussi parce
que la couleur rajoute quelques mois de boulot derrière.
Je n'avais pas envie de faire la couleur sur les
Stryges, je ne le sentais pas. Je n'y voyais pas
d'intérêt. Le travail d'Isabelle Merlet était très bon.
On s'est bien entendu, elle était à proximité aussi,
c'est important. On se voyait assez souvent, on
discutait énormément.
Du coup la
collaboration était plutôt agréable. Il se trouve que
Isabelle a voulu abandonner la couleur BD parce que ça
ne lui correspondait pas, ce que je comprends
parfaitement. En revanche le changement ne s'est pas
fait dans de bonnes conditions, on n'a pas eu beaucoup
de temps pour trouver quelqu'un de disponible etc. Du
coup personne n'était très satisfait des couleurs du
tome cinq.
Il y a eu une période de réglage
des couleurs sur ce tome, il a fallu faire la
transition, Ruby n'a pas eu beaucoup de temps pour le
réaliser et je n'ai pas pu lui donner d'indications
puisque moi aussi j'étais à la bourre
etc.
En revanche sur le tome six cela
s'améliorait. Mais aujourd'hui j'ai envie d'un
traitement plus adapté à mon
graphisme.
Après dans ces choix d'ambiance,
de palette de couleur etc. il y a des choses très
bonnes, mais je trouve que les couleurs avaient tendance
à ternir et à aplatir un peu le dessin. Avec Favrelle,
nous essayons d'amener les couleurs vers un traitement
plus dynamique, plus contrasté mais qui n'estompe pas
l'aspect graphique.
Sceneario.com : Corbeyran intervient sur la question des couleurs ?
Richard Guérineau : De temps en temps. Cela dit, il me laisse prendre les décisions finales, mais son avis est important pour moi, tout comme le mien l'est pour lui. C'est très important quand on collabore sur un projet.
De la même manière que je ne veux pas brider complètement les coloristes, je ne veux pas être un simple exécutant pour un scénariste. J'aime participer au contenu, j'ai envie que le récit me ressemble à moi aussi donc j'ai envie de m'impliquer et d'avoir une certaine liberté dans mon travail.
De la même manière, quand je bosse avec un coloriste je considère que ce n'est pas un exécutant. Je veux lui laisser une certaine liberté et je pense que pour le coloriste cela réside dans le choix de la palette de couleurs.
Traduire des couleurs avec des mots c'est difficile, donc je vais plus donner des indications d'ambiance dans le genre « là il faut que ce soit mystérieux, là ce doit être inquiétant, là plutôt ambiance cosy, lumière tamisée, ambiance feutrée, ou alors ambiance très contrastée avec des sources de lumière assez violentes etc. ».
Il y a aussi les indications purement narratives genre : lui, il a un costume blanc. Mais ce sont vraiment des détails.
Ca m'arrive de faire des propositions mais cela reste des indications assez générales. En revanche ce que je recherche c'est d'avoir plus un traitement, un coup de pinceau qui accompagne le dessin et qui ne le contredise pas. Chose qui arrive souvent.
J'essaie d'avoir un graphisme assez dynamique et un trait jeté, marqué, avec des accents et par exemple il ne faut surtout pas un traitement des volumes qui soit mou. Quand il y a de la mollesse dans le volume, cela contredit complètement le dessin, du coup ça ne marche pas, les intentions sont perdues.
Dans ce cas j'essaie d'amener le coloriste à quelque chose de plus tranché, que l'on voit un peu plus le coup de pinceau, pas d'effet aérographe ...
Sceneario.com : Comment as-tu choisi ton style de dessin par rapport à la série ?
Richard Guérineau
: Il y a deux choses : Il y a d'abord le
registre dans lequel on travaille, en l'occurrence c'est
un registre réaliste pour les Stryges. C'était un choix
délibéré dès le départ. Après, le style c'est quelque
chose de très personnel. Je l'ai adapté dans le sens où
j'ai fait un dessin plus réaliste que dans L'as de
pique, mais le style est lié au graphisme. Il vient de
manière assez naturelle.
Cette progression dont on
parlait tout à l'heure se fait de manière naturelle en
avançant au fil des albums et le style naît à un moment
dans tout ça. Ce n'est pas quelque chose d'analysé à
l'avance, ça vient petit à petit.
C'est
pour cette raison que lorsque je revois les premiers
Stryges je trouve ça un peu raide, je trouve l'encrage
un peu mou parfois et ce sont des choses que j'ai résolu
depuis. Le style naît comme ça, on n'arrive pas avec un
style.
N'importe quel auteur, même le plus reconnu a
commencé avec un style fait de bric et de broc. Au fil
des années ça devient du Tardi, du Pratt ou du
Machinchose.
Sceneario.com : De qui était l'idée de mettre des petits clins d'œil au cinéma ?
Richard Guérineau : J'ai fait ça à un
moment, comme ça, pour m'amuser, pour faire des clins
d'œil aussi au lecteur parce que j'ai mis uniquement des
gens connus. Il y en a quelques uns qui le sont moins,
mais effectivement ceux-là ont ne m'en parle jamais.
Ca vient aussi de Corbeyran qui, parfois, quand un
nouveau personnage entre dans le récit, le décrit en
faisant référence à un acteur « genre Untel ». Après
j'en fais ce que j'en veux. C'est venu de là
aussi.
J'ai un peu arrêté de le faire, cela
ne m'amusait plus. Il n'y en a pas dans le dernier tome.
Il y a des références mais elles ne sont pas forcément
sur des tronches d'acteurs.
Sinon, c'est plus une
private joke, j'ai mis tous mes camarades d'atelier et
ma compagne pour tous les personnages qui se font
descendre au début du tome 7.
Sceneario.com : Comment s'est faite la genèse des Stryges d'un point de vue morphologique ?
Richard Guérineau : J'ai fais pas mal
de recherches avant de trouver vraiment le look final,
le design final des stryges.
Au départ globalement
ils avaient à peu près la même morphologie. Mais dans
mes tous premiers croquis que je n'ai jamais montré, ils
avaient des ailes de chauve-souris.
A
l'époque il y avait un dessin animé à la télé qui
s'appelait Gargoyles. Cela y ressemblait un peu trop et
on a décidé de s'en écarter.
On a aussi a voulu
s'écarter des ailes de chauve-souris qui les rapprochent
trop des vampires classiques pour les associer davantage
aux anges, mais à des anges noirs en leur faisant des
ailes en plumes.
Donc il y a eu toute une phase de
réglages où je faisais des crobars.
Et puis
comme dans les premiers albums on ne les voit pas
beaucoup, cela m'a laissé du temps pour bien les
maîtriser.
En tout cas l'idée de départ était
surtout de ne pas faire du grand guignol. Il ne fallait
pas que ce soit la créature de série B grimaçante,
monstrueuse. Il fallait vraiment que ce soit une
créature plus mystérieuse avec un coté plus hiératique,
qui ait comme ça une espèce de noblesse dans la
monstruosité, si ça peut exister
(rires).
Sceneario.com : Il est à la mode de traiter la jeunesse des personnages, c'est prévu là ?
Richard Guérineau :
(Rires) Non, on aura du mal, là !
Cela dit, on
abordera non pas la jeunesse de l'Ombre, mais en tout
cas son passé. C'est prévu, mais pas la jeunesse, non
(rires).
Sceneario.com : En parlant de l'Ombre, on constate dans la série que les personnages masculins ont un rôle relativement secondaire, les personnages féminins sont eux plutôt mis en avant. Pourquoi le choix d'une héroïne par exemple ?
Richard Guérineau : A vrai dire, je ne
sais plus dire pourquoi on a choisi une héroïne au
départ. Je ne sais pas si Corbeyran s'en souviendrait
mieux que moi.
Dans la première saison,
Nivek et l'Ombre sont un peu sur le même plan, ils ont
la même importance. Comme l'Ombre reste très
mystérieuse, on ne sait quasiment rien sur elle. Elle a
un côté plus abstrait. Nivek a le point de vue du
lecteur, il découvre le phénomène et c'est un être
humain à peu près normal, contrairement à
l'Ombre.
En revanche, il est vrai que dans
la deuxième saison, c'est clairement l'Ombre qui occupe
le premier rôle. En plus il y a un nouveau personnage
féminin qui intervient, donc cela s'affirme dans la
deuxième saison.
De plus, on a fait
vieillir Nivek, il n'a plus envie de se battre, il est
fatigué. On s'amuse beaucoup avec ça, renverser un peu
les rôles traditionnels. Et puis cela sert le récit, on
verra pourquoi dans la suite.
C'est important que
Nivek soit un peu largué, il va jouer son rôle malgré
tout, mais presque malgré lui.
Et puis dans
l'évolution du récit, il y a des choses qui s'imposent
un peu toutes seules.
Des fois, ça vient d'une
blague que l'on fait au détour d'une conversation « Ah
tiens et si Nivek, on le faisait dégringoler petit à
petit ? ». Ca part comme ça, d'une boutade, ensuite on
le prend au sérieux et on le met en place.
Le personnage de Jill c'est encore
différent. C'est un personnage qui était apparu dans un
récit court que l'on avait fait dans le numéro trois de
Pavillon Rouge, un récit en six planches sur les
Stryges. Eric n'était pas trop dispo, c'était hyper
pressé et il fallait trouver rapidement quelque chose.
J'avais un croquis comme ça d'une nana, introduisant une
deuxième Ombre, un deuxième agent, une femme mais dans
une version plus masculine.
Et puis après
c'est devenu « et si elle était homosexuelle etc. » On
s'amuse comme ça avec des personnages. Certains
trouveront ça cliché ou puéril, mais pourquoi ne pas
intégrer tout cela, même si ce n'est pas le sujet
principal du récit. Cela amène des personnages un peu
plus surprenants, avec des réactions différentes des
personnages présents jusques là.
L'homosexualité de
Jill, on va s'en resservir plus tard, dans le récit du
tome 10. Notamment, elle va revenir voir son ancienne
copine pour lui soutirer à nouveau des
infos.
On reste tout de même dans un récit
de genre, donc la psychologie des personnages et leur
comportement est toujours au service du récit. C'est la
différence essentielle avec la BD intimiste dans
laquelle le sujet du récit est de raconter les gens,
comment ils sont, comment ils vivent etc. Si on a un
personnage homosexuel, on va essayer de faire passer un
message sur l'homosexualité ou je ne sais quoi.
Nous, on fait de la BD de genre donc ce n'est pas
notre objectif, les personnages ont pour rôle premier de
faire avancer le récit.
Sceneario.com : En ajoutant ce personnage homosexuel on rétablit presque l'équilibre homme / femme ?
Richard Guérineau : C'est exactement
ça. Ce qui est intéressant en plus, c'est qu'il va y
avoir des relations entre eux qui vont se mettre en
place de manière très souterraine. Des espèces de
jalousies...
L'Ombre est visuellement très
féminine certes, mais en réalité elle est asexuée ou «
bisexuée », elle joue un rôle plutôt masculin. Elle a
plus un comportement de mec. Du coup, de quel côté elle
est, ça peut créer des trucs intéressants pour les
personnages dans le récit.
Et puis, je
pense que c'est important pour le lecteur d'avoir des
personnages ambigüs, même s'il ne le ressent pas
consciemment, ça aide à accepter certaines choses.
Sceneario.com : L'ombre se dénude dans le tome 8. Jusqu'où comptez-vous aller ? Vous êtes-vous fixés des limites ?
Richard Guérineau
: Oui. La scène du tome 8 est une prémisse. En
fait, ce que j'appelle vulgairement une « scène de cul »
(rires), il n'y en aura qu'une seule dans toute la
série.
Il n'y en aura qu'une, mais elle
arrivera à un moment où il y aura une espèce de
révélation troublante.
Elle ne sera donc pas
gratuite.
Pour l'instant, on ne sait pas encore
où elle sera placée.
Elle sera à l'image de celle du
tome 8, on amènera une séquence sexy pour au final
aboutir à quelque chose qui a trait à la
mort.
Là dans la séquence du tome 8, on
mélange un truc un peu sexe et un autre très gore. C'est
la base même du film d'horreur, jouer entre les pulsions
sexuelles et les pulsions de mort. Cela crée forcément
une sensation de malaise.
C'est donc avec
ces codes là que l'on s'amuse, je suis un grand fan de
tout ce cinéma là et je m'éclate à dessiner ce genre de
séquence.
C'est faire du cul sans faire du cul en
somme, on amène quelque chose qui va totalement à
l'encontre et je trouve cela passionnant.
Sceneario.com : La dernière image de la scène donne une dimension spéciale au personnage de l'ombre ;o)
Richard Guérineau : L'idée du bout de verre était pour faire un truc déjà assez sanglant, violent. Ce qui est intéressant dans le fait qu'elle le fasse avec un morceau de verre dans la bouche, c'est que cela donne à la dernière image un côté vampire, elle le vampirise complètement. Elle a du sang partout, elle reste magnifique mais en même temps, elle est effrayante. L'idée est de jouer sur des sentiments contradictoires et ambivalents.
Sceneario.com : Vous cherchez vraiment à vous amusez avec cette série, c'est vraiment pour le fun ! ;o)
Richard Guérineau : C'est clair, surtout quand on part sur une série longue comme ça. Ce que je veux c'est ne jamais m'ennuyer. Autrement je ne peux pas bosser. Donc il faut sans arrêt que l'on trouve des trucs en plus comme ça.
Après il y a des choses qui reviennent. Il y a les inévitables séquences en voiture par exemple. Mais ce sont des choses utiles dans le scénario pour placer des informations. J'ai l'impression de les avoir redessinées quinze fois, mais on ne peut pas y couper.
En revanche, quand on est sur des séquences importantes là on cherche à trouver quelque chose de fort.
Sceneario.com : D'après-toi, le succès de la série est-il lié au fait que le fantastique fasse référence aux peurs ancestrales de l'être humain ?
Richard Guérineau : Certainement, mais je pense que ce
n'est pas aussi simple que ça.
De manière générale,
le fantastique est toujours lié à des angoisses
existentielles que l'on a tous, consciemment ou pas. Il
joue sur ces angoisses de mille manières, transformant
l'angoisse en peur. La différence entre l'angoisse et la
peur, c'est que la peur a un objet.
Quand
on a peur de quelque chose, on sait de quoi on a peur.
Quelque part c'est rassurant, c'est paradoxal mais
rassurant. En revanche, une angoisse c'est quelque chose
de diffus, de vague, etc. et ça, c'est insupportable.
Pour moi, le fantastique, que ce soit au cinéma en
littérature ou en BD, a pour vocation justement de
donner corps, de manière métaphorique, à toutes nos
angoisses.
Ca peut être des monstres ridicules de
série B, résultat : on en rigole plus qu'on en a peur.
Nous ce que l'on voulait faire avec les Stryges
c'était effectivement jouer sérieusement sur toutes ces
questions que l'on se pose et les incarner dans ces
créatures que sont les Stryges.
C'est en ce
sens là que l'on dit que les Stryges sont notre destin,
est-ce que c'est eux qui tirent les fils de notre
existence etc. ...
A la fin du tome 6 quand ils
descendent dans la crypte, avec l'histoire de l'humanité
et au-delà qui est inscrite sur les parois, c'est une
métaphore. La personne qui serait capable de déchiffrer
tout ça d'un bloc serait l'équivalent de ce que l'on
appellerait un dieu et cela n'existe pas, enfin à mon
avis (rires).
Ca peut paraître ridicule de dire ça
sur une série qui reste quand même une série de genre.
Mais je crois que dans tous les films de genre, les
livres de genres il y a une forme
d'intelligence.
Ce ne sont pas que des
trucs crétins. Ce sont des choses qui nous parlent d'une
manière métaphorique. C'est sans doute ça que les gens
de culture n'apprécient pas, disant que ce n'est jamais
que de la métaphore, que c'est facile etc. Mais on
ressent des choses, cela évoque des choses qui sont
ancrées profondément en nous.
Donc effectivement c'était notre volonté avec les Stryges de traiter tout ça mais de manière ludique, à la façon d'une série de genre.
Après, est-ce que c'est ça qui fait le succès des Stryges ? J'aurais tendance à dire oui, j'espère que c'est ça qui fait le succès des Stryges.
Mais on ne sait pas vraiment à quel point cela peut jouer chez les lecteurs, en tout cas ils en parlent assez peu. Difficile de savoir étant donné que c'est de l'ordre de l'inconscient, du ressenti chez le lecteur, il ne va pas l'analyser.
Je pense que c'est ce qui fait la différence entre une série où on projette vachement de questions, de préoccupations personnelles et une série où on fait tout simplement de l'action avec des monstres.
J'espère en tout cas que cela fait une différence.
Sceneario.com : Cela me rappelle quelques planches en couleur directe dans l'édition noir et blanc du tome 8, où un Stryge apparaît comme un dieu « maléfique » pour ce qui s'apparenterait à l'être humain. Des destins qui semblent liés sans que l'on sache lequel des deux dépend vraiment de l'autre.
Richard Guérineau
: C'est ça. Ce récit était aussi paru dans
Pavillon Rouge.
Il détient la clef de tout. Sauf
que, on l'a mis sous une forme un peu ésotérique, un peu
hermétique.
Peu de gens m'en ont parlé. J'ai
l'impression qu'ils sont restés perplexes. Tant mieux
puisque ce sont des choses qui seront amenées derrière,
mais la clef est là. C'est quasiment l'origine du
rapport des Stryges à l'humanité avec une grosse
référence à 2001 l'odyssée de l'espace. A la fin, à la
place du monolithe c'est un Stryge avec les premiers
hominidés.
Sceneario.com : Le créateur apparaît donc comme un dieu « mauvais ».
Richard Guérineau : Quand on regarde
bien dans la religion chrétienne les rapports de dieu
avec Lucifer. Lucifer a été banni parce qu'il a voulu
apporter la lumière à ceux qui devaient devenir plus
tard des hommes.
Il n'y a pas vraiment de notion de
bien et de mal.
Dans la première saison les
Stryges ont amené l'écriture à l'Homme.
Mais alors
les Stryges ne sont pas totalement malfaisants
puisqu'ils nous ont apporté quelque chose qui fait
partie des fondements de la
civilisation.
Mais en même temps l'écriture
renforce les rapports de domination. Ce n'est plus celui
qui tient la massue qui va être les chef mais davantage
celui qui va savoir lire et écrire qui va prendre le
pouvoir.
Du coup est-ce que c'est un bienfait
?
Dans l'absolu, il n'y a pas de positif et de négatif, il n'y a pas de bien et de mal, la dualité des Stryges est là.
Si on considère que le premier Stryge c'est Lucifer, c'est lui qui a amené l'Homme à son statut d'Homme. Est-ce que c'est bien, est-ce que c'est mal, on ne pourra pas répondre à ça. Tout dépend du point de vue où on se place.
Sceneario.com : Le but est que le lecteur se pose des questions ;o)
Richard Guérineau
: C'est effectivement ce qu'on souhaite.
Dans la deuxième saison, on laisse un peu de côté
les stryges. On se focalise sur un homme, Sandor Weltman
qui lui semble cristalliser dans son entourage
énormément de choses, il a en particulier les Stryges
autour de lui.
Comme il s'agit d'un homme,
il y a quelque chose de plus concret et de plus proche
de nous, même s'il est assez particulier.
Le regard
que l'on va porter sur toutes ces questions sera un peu
différent du fait que l'on a à faire à un
homme.
Je ne vais pas tout dévoiler, mais
l'idée du personnage est vraiment vertigineuse.
Elle
paraîtrait toute conne si vraiment je la disais là, ce
serait une déception.
Mais vu comment on va
l'amener, le personnage va être magnifique (rires).
Sceneario.com : Est-ce que les discussions que tu as avec ton lectorat peuvent influencer d'une manière ou d'une autre le scénario ?
Richard Guérineau : Non,
parce que les gens en dédicace ont toujours deux ou
trois albums de retard sur nous. Là ils ont lu le tome
huit et récemment on a réalisé le synopsis du tome dix.
Je viens de terminer le neuf donc il y a toujours un
décalage qui fait que c'est impossible.
Et
puis, si on avait du écouter tous les avis que l'on a
eu, on se serait arraché les cheveux depuis longtemps et
on aurait laissé tomber. Ça, c'est clair ! (rires)
Sceneario.com : Tu participes au scénario des séries parallèles ?
Richard
Guérineau : Je donne mon avis, mais en revanche
je n'ai pas voulu m'impliquer ni dans l'écriture ni dans
l'aspect graphique.
Je reste un peu extérieur, mais
comme on a créé la mythologie des Stryges ensemble avec
Corbeyran et qu'il y a des connections avec Le maître de
jeu et Le clan des chimères, forcément je suis amené à
donner mon avis.
En général je n'ai pas
grand-chose à relever, à part pour jouer le chieur sur
des points de détails (rire).
Sceneario.com : Les Stryges occupent une grande partie de ton temps. Tu as d'autres envies ?
Richard
Guérineau : J'ai un projet que je vais proposer
à des éditeurs dans un genre très différent.
J'ai
commencé à faire une adaptation de Don Quichotte dans un
style pas du tout réaliste.
Ce sera un truc un peu
délirant.
J'avais envie de faire quelque chose tout
seul.
Pourquoi Don Quichotte ? Peut-être parce que
c'est un truc un peu de cinglé, peut-être parce que
c'est un truc maudit au cinéma, tout ce côté-là.
Et
puis c'est un récit, je me suis longtemps posé la
question après l'avoir lu : Don Quichotte c'est un
anti-roman d'aventure. Faire ça en BD, je vais faire une
anti-BD d'aventure, ce n'est pas gagné. Et en même temps
c'est ce qui est amusant et motivant.
Tout
ce qui se passe dans le roman est dérisoire. Il n'y a
aucun suspens, la quête n'a pas d'objectif etc. Tous les
ingrédients qui font le récit d'aventure sont
complètement laminés d'entrée par Servantes.
Je me
suis dit que ce serait une connerie que de vouloir
essayer d'en faire l'inverse.
Mais comment arriver avec ça à faire
accrocher le lecteur et à créer un récit et surtout un
personnage qui soit à la fois horripilant et à la fois
attachant parce que c'est exactement ce que l'on ressent
en sortant du roman.
On a une image très déformée du
roman, très romantique, très révolutionnaire du
personnage.
En réalité ce n'est pas ça, c'est un
pauvre fou qui vit dans un autre monde et qui prend les
moulins à vent pour des géants, des troupeaux de moutons
pour une armée, et qui ne fait vraiment que des
conneries qui sont loin d'être
innocentes.
Donc le récit en lui-même est
très simple. Je vois la chose comme un défi de
narration. Essayer de faire des choses que je ne peux
pas faire dans les Stryges.
J'ai l'idée un peu
farfelue d'intégrer là dedans des tas d'images de films
de genre, de vieux films de genre, de série b, de série
z, de pulp, ... voilà.
L'idée est de faire un
truc un peu étrange, mais je ne suis pas sûr d'arriver à
vendre ça auprès des éditeurs, c'est très casse gueule.
Le contexte n'est pas idéal. Il y a déjà saturation
donc les éditeurs commencent à vouloir baisser un peu la
production.
J'espère bien parvenir à
trouver un éditeur qui sera intéressé sachant que ce
n'est pas ce qu'ils attendent de moi.
C'est
un peu le piège aussi de la série à
succès.
J'ai des propositions mais à chaque
fois pour faire du thriller contemporain.
Ca n'a rien à voir avec ce que je fais dans les Stryges, le dessin est très jeté, pas réaliste. En matière de narration ce sera très simple, je ne change pas de point de vue tout le temps comme je le fais dans les Stryges pour créer du mouvement. Là au contraire ce sera très statique, il y aura beaucoup de dialogues.
En plus ce sera un one shot aux alentours de 70 pages.
Déjà l'idée de travailler sur Don Quichotte c'est à double tranchant.
Sceneario.com : En tous les cas présenté comme ça cela suscite l'intérêt :o)
Richard Guérineau : J'ai réalisé
quelques planches et je pense que visuellement cela peut
séduire. Le dessin est jeté, un peu charbonneux mais
très coloré.
Mais séduire un lecteur et
séduire un éditeur, ce n'est pas la même chose.
Au
début, pour Le chant de stryges aucun éditeur n'y
croyait. On nous l'a refusé quasiment
partout.
Des projets qu'on a laissé tombé
avec Eric, il y en a pas mal.
Dans ces cas là, tu
passes à autre chose.
Je prépare également
un projet Western, c'est une vieille envie qui m'est
revenue récemment mais je préfère prendre mon temps,
pour l'instant ces projets ne sont pas encore finalisés
ni validés par un éditeur.
Peut-être même que je ne
devrais pas en parler, on ne sait jamais, peut-être
qu'ils ne verront jamais le jour et que je passerai à
autre chose... Ca ne serait pas la première fois.
Sceneario.com : En tous les cas tous nos vœux pour que cela fonctionne :o)
Richard Guérineau : Merci.
Interview réalisée par Sceneario.com (2005)
Propos recueillis par Berthold et Isa.